On estime qu'environ 150 000 personnes sans-papiers vivent en Belgique. Ces personnes travaillent souvent dans de mauvaises conditions de travail et pour des salaires très bas, qui sont loin de correspondre aux salaires minimums légaux, et encore moins aux 14 euros/heure pour lesquels la FGTB fait campagne. En décembre 2021, la campagne nationale "In my name" a été lancée, visant l'adoption d'une loi avec des critères clairs et une procédure indépendante pour la régularisation des sans-papiers. La mobilisation civile responsable de cette initiative a été co-construite et soutenue par les syndicats : dans leur lutte (internationale) pour un travail décent et contre l'instrumentalisation des sans-papiers pour faire pression sur les salaires, la sécurité sociale et l'unité de lutte des travailleur.euse.s.

Un contexte d’exclusion, d’exploitation et de lutte

On estime qu’environ 150 000 personnes vivent sans papiers en Belgique, ce qui représente 1 % de la population. Les personnes qui n’ont pas de permis de séjour légal travaillent souvent dans de mauvaises conditions et pour des salaires très bas, qui sont loin de correspondre au salaire minimum légal, et encore moins aux 14€/heure pour lesquels la FGTB mène campagne. Les personnes sans papiers sont également exclues de pratiquement toute forme de protection sociale*, même celles qui vivent et travaillent en Belgique depuis des années. Impossible de parler du travail décent. Le manque d’indépendance financière, l’exclusion de l’accès à la sécurité sociale et la peur de la répression et de l’expulsion rendent ces travailleurs particulièrement vulnérables à l’exploitation économique et aux abus sexuels et autres sur le lieu de travail.

La crise du Covid a frappé cette partie de la population de plein fouet. De nombreuses personnes sans papiers ont perdu leur emploi et leur maigre salaire et n’avaient nulle part où aller. D’autres ont été poussé∙e∙s par leurs patrons à travailler sans protection adéquate contre la contamination. Cette situation a déclenché un nouveau mouvement de sans-papiers. Ils ont demandé au gouvernement d’introduire une loi avec des critères clairs pour la régularisation. Ces critères devraient donner une perspective plus claire et juste aux personnes qui demandent une régularisation et fournir un guide pour la rédaction de cette demande. Ces critères devraient également empêcher, par exemple, que des personnes ayant les mêmes parcours reçoivent des jugements différents (arbitraire), comme cela a été le cas à plusieurs reprises.

Le mouvement des sans-papiers s’est également montré solidaire d’autres mouvements. Leur participation, par exemple, aux actions féministes et syndicales (comme des actions consécutives à la grève interprofessionnelle autour des négociations de l’AIP organisée par la FGTB en mars 2021, l’action du 1er mai 2021,…), a montré leur engagement en faveur de la convergence des luttes et de la solidarité. Le mouvement s’est retrouvé à plusieurs reprises dans les médias, et les critiques au niveau national et international** de cette politique inhumaine au cours des actions ont suivi. Surtout après que certain∙e∙s militant∙e∙s ont finalement entamé une grève de la faim, excédé.e.s par l’absence de réponse positive du Secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration, Sammy Mahdi (CD&V), à leur demande d’introduire une législation claire pour le processus de régularisation. Une réponse que l’on attend toujours.

 

Le projet de loi citoyenne ‘In My Name’

Le 8 décembre 2021, la campagne nationale « In my name », une initiative de l’Union des sans-papiers pour la régularisation (USPR), de la Coordination des sans-papiers de Belgique et du collectif Zone Neutre, a été officiellement lancée. Cette initiative vise à adopter une loi comportant des critères clairs et une procédure indépendante pour la régularisation des sans-papiers. L’objectif est d’obtenir 25 000 signatures d’ici le 17 mai 2022, date à laquelle le Parlement fédéral pourra examiner le projet de loi citoyenne. La mobilisation civile à l’origine de cette initiative a été co-construite et soutenue par la société civile et les syndicats.

 

Le projet de loi citoyenne plus en détail

Il s’agit d’une proposition de loi civile visant à modifier la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers.

Les articles concernent les sujets suivants :

  1. Suppression de l’obligation de présenter la demande depuis le pays d’origine
  2. Documents d’identité (impossible pour les apatrides)
  3. Adresse de la résidence effective
  4. Critères liés à l’impossibilité de retour (apatrides, parents d’enfants qui ont le droit de séjourner en Belgique, couples de nationalités différentes qui ne peuvent pas mener leur vie familiale dans un autre pays, personnes qui, pour des raisons indépendantes de leur volonté, ne peuvent pas retourner dans leur pays d’origine parce que leurs droits fondamentaux y sont violés)
  5. Critères liés à la vulnérabilité (personnes âgées, victimes de violences intrafamiliales ou autres à l’encontre des femmes, personnes handicapées, personnes souffrant des maladies mentales, victimes de torture, de viol ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, femmes enceintes et parents de jeunes enfants)
  6. Critères liés à l’établissement durable (Familles dont les enfants sont scolarisés en Belgique depuis 2 ans, personnes vivant en Belgique depuis 5 ans)
  7. Critères liés à un projet individualisé
  8. Ordre public (Le droit de séjour peut être refusé pour des raisons d’ordre public, mais seulement en raison d’infractions personnelles graves. Le travail non déclaré ou les infractions liées au parcours migratoire ne peuvent être pris en compte)
  9. Interdiction d’entrée
  10. Création d’un comité d’appel indépendant (Si la décision du département de l’immigration est négative, l’ étranger∙ère peut faire appel auprès d’un comité d’appel indépendant dans un délai de 30 jours. Ce comité comprend un secrétariat, composé de fonctionnaires, et des Chambres)
  11. Délais (Le département de l’immigration doit donner une réponse dans les 6 mois suivant l’introduction de la demande. S’il n’y a pas de réponse, la décision est considérée comme positive)

 

Solidarité entre travailleureuses avec et sans papiers pour une société meilleure

L’IFSI soutient, tout comme la FGTB, l’exigence de régularisation selon des critères clairs et la création d’une commission indépendante chargée de traiter les demandes.

Le contexte géopolitique mondial est marqué par des crises climatiques, sanitaires, économiques,  politiques et par la guerre. Alors que les besoins de refuge augmentent, les voies légales de migration et d’asile diminuent, comme le montre une fois de plus le projet de nouveau Pacte européen sur la migration et l’asile. Cela met en danger les droits humains, dans le monde entier mais aussi spécifiquement en Belgique. La FGTB demande donc une politique qui offre des solutions dignes et humaines aux crises actuelles et futures.

En outre, l’initiative citoyenne part de l’idée fondamentale que la migration est un atout pour la Belgique. Les personnes sans papier travaillent souvent dans des secteurs essentiels et des professions en pénurie comme la garde d’enfants, les soins aux personnes âgées, la construction, la distribution, la restauration et le nettoyage. Il est inadmissible que ces personnes qui contribuent à la prospérité du pays soient laissées sans droits.

En outre, le maintien d’une société où les patrons peuvent profiter de la situation précaire des travailleur∙euse∙s sans-papiers signifie une détérioration générale du marché du travail. Les travailleur∙euse∙s sans-papiers sont instrumentalisé∙e∙s pour faire pression sur les salaires de tou∙te∙s les travailleur∙euse∙s, pour affaiblir le filet de sécurité sociale et pour contrer une lutte unie des travailleur∙euse∙s pour de meilleures conditions de travail. Le projet de loi « In My Name » s’inscrit dans le cadre de la lutte pour le travail décent, une lutte que mènent les travailleur∙euse∙s de tous les pays.

 

Signez la petition ici :  In My Name – Une loi citoyenne pour la régularisation

Plus d’informations sur la campagne :

Site web : In My Name – Une loi citoyenne pour la régularisation

Facebook : In my name | Facebook

Instagram: https://www.instagram.com/

* Les personnes sans-papiers peuvent juste bénéficier de l’aide médicale urgente qui est une forme d’aide sociale et de la couverture en accident de travail. Néanmoins, cette couverture est souvent théorique.

** Cf. des cartes blanches du PS et Ecolo, de Cire asbl (avec 115 organisations signataires comme CNCD-11.11.11,  FGTB Wallon, FGTB Bruxelles, FGTB Namur,…); lettre ouverte des membres de personnelles et/ou étudiant.e.s des universités (VUB, ULB,Université de Gand); lettre ouverte de plus que 100 d’ universitaires et militant∙e∙s de renommée internationale, tels que Angela Davis, Noam Chomsky, Roger Waters, Yannis Varougakis, Ken Loach…